« Préparez-vous à la disparition de l’euro », lance Emmanuel Todd, un brin malicieux, à une assistance de financiers peu habitués à ce discours direct.
L’historien et démographe invité, le 17 novembre, par la Compagnie financière Jacques Cœur à s’exprimer sur la survie de la monnaie unique et les politiques protectionnistes, aux côtés de Philippe Moreaux Defarges, chercheur à l’Ifri, ne plaisante pas.
Il faut dire qu’il a déjà un long passé d’opposant à la monnaie unique. En 1995, dans son livre « L’invention de l’Europe », Emmanuel Todd décrivait le continent européen comme un champs d’affrontement. Sa perception n’a pas changé. « L’Europe n’existe pas. C’est un espace parcouru de ressentiments, dans lequel l’Allemagne mène une politique négative sur le dos de ses partenaires. Elle a délocalisé une partie de son industrie en Europe de l’Est et pratiqué une désinflation compétitive du travail. Berlin réalise ses excédents commerciaux face à ses voisins européens (qui ne peuvent plus dévaluer par rapport au Mark comme ils l'avaient fait pendant un demi-siècle)», décrit-il.
L’historien fustige les politiques européennes de relance par la dette publique qui ne leur profitent pas, mais alimentent la croissance chinoise. « Les gouvernements n’ont pas le courage d’affronter la Chine, regrette-t-il. Sa puissance est celle qu’on lui donne. Elle est très dépendante des investissements directs étrangers. »
Pour Todd, la récession est programmée. Elle semble même organisée par la lutte contre les déficits budgétaires. Selon lui, "l’euro-maginot a mis la France sous tutelle de l’Allemagne. Ce qui a eu pour effet de détruire la moitié de son industrie. La disparition de la monnaie unique nous donnera une bonne bouffée d’air frais", estime-t-il.