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1 mars 2012 4 01 /03 /mars /2012 12:20

Ou le terrible aveu du Président de la BCE qui préconise, pour sauver le dogme de l'euro-maginot, de mettre fin au modèle social européen. On notera au passage que Mario Draghi n'a jamais été élu par personne et n'a aucune légitimité pour parler  des choix de société des peuples d'Europe. Dans une démocratie, les haut-fonctionnaires, y compris ceux de la banque centrale, mettent en oeuvre la politique choisie par le gouvernement, qui tire sa légitimité du peuple souverain via les élections. En Europe, c'est désormais l'inverse: un technocrate non élu impose ses choix aux citoyens, sans leur demander leurs avis, alors même que les décisons passées de la BCE se sont révélées être un désastre.

Un article à lire et à faire tourner de toute urgence !!

 

Article paru dans la Tribune le 24 février 2012

 

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Le patron de la Banque centrale européenne annonce la mort du modèle social européen... et se prépare à faire un nouveau chèque de 500 milliards d'euros aux banques. Bienvenue dans le "QE World" ou comment les banques centrales soutiennent massivement le rétablissement de la confiance, au prix d'une austérité sans précédent.

"Le modèle social européen est mort" ! Jamais un banquier central n'avait parlé avec autant de brutalité de la crise que nous traversons. Les propos tenus par l'Italien Mario Draghi, le successeur de Jean-Claude Trichet, dans le long entretien qu'il a accordé au Wall Street Journal vendredi 24 février, sont tellement violents, par ce qu'ils impliquent, qu'il n'aurait sans jamais pu les tenir ailleurs que dans la « bible » de la finance mondiale. Même Jean-Claude Trichet avait plus de précautions de langage quand il tentait d'expliquer aux peuples européens ce qui les attend.

Pour Mario Draghi, ancien banquier de Goldman Sachs et nouvelle statue du Commandeur de la monnaie en Europe, sauver l'euro aura un prix élevé. Selon lui, il n'y a "pas d'échappatoire" possible à la mise en œuvre de politiques d'austérité très dures dans tous les pays surendettés et cela implique de renoncer à un modèle social fondé sur la sécurité de l'emploi et une redistribution sociale généreuse. Ce modèle sur lequel l'Europe a basé sa prospérité depuis la seconde guerre mondiale a disparu (« has gone »), estime Mario Draghi qui rappelle aux journaliste du WSJ la formule de l'économiste allemand Rudi Dornbusch : "Les Européens sont si riches qu'ils peuvent se permettre de payer les gens pour ne pas travailler".

 

Provocation


L'intervention du patron de la BCE pourrait sembler une provocation, une semaine avant que la banque centrale ne renouvelle un deuxième chèque de 500 milliards d'euros aux banques qui viendront mercredi 29 févier emprunter de l'argent au guichet illimité qu'elle a mis en place pour sauver l'euro. Comment échapper, avec de tels propos, à la critique montante selon laquelle le système est en train de sacrifier les peuples pour sauver les banques ? Les arguments mis en avant par Mario Draghi sont sans appel : tout recul sur les ambitions des programmes de désendettement publics provoquera une immédiate réaction des marchés qui pousseront les taux d'intérêt payés par les Etats à la hausse, rendant encore plus difficile, sinon impossible, le rétablissement des finances publiques. C'est ce qui est arrivé à la Grèce et a failli se produire au Portugal, en Espagne, en Italie.
Les propos de Mario Draghi ne sont évidemment pas sans lien avec le calendrier électoral européen. En avril en Grèce, en mai en France, au printemps 2013 en Italie, les peuples vont voter pour choisir leur destin. En expliquant, à la façon d'une Margaret Thatcher des temps modernes, que quel que soit le résultat du vote, les gouvernement élus n'auront pas d'autre alternative que de poursuivre des politiques de rigueur extrêmes, de mener des réformes structurelles du marché du travail et de démanteler encore un peu plus leur modèle social, le président de la BCE affiche la couleur. Et qu'on ne vienne pas lui dire que l'accalmie actuelle sur les marchés signifie que la crise est finie. La preuve que ce n'est pas le cas viendra mercredi, quand les banques viendront chercher auprès de la banque centrale le soutien sans lequel le système financier ne peut pas tenir. Sans la perfusion des banques centrales, aux Etats-Unis avec le "Quantitative easing" de la Fed, en Europe avec le LTRO de la BCE, tout s'écroulerait ! Même la Chine en est réduite à soutenir ses banques en difficultés. Bienvenue dans le monde cruel du « QE world ».

 

"Redressement national" de la "France forte"


Par cette prise de position très dure, Mario Draghi appelle à une prise de conscience. Mieux vaut selon lui en passer par une purge sévère et des réformes structurelles tout de suite pour rétablir la confiance des marchés que de vivre dix années terribles sous leur pression. C'est le choix fait par Mario Monti en Italie, avec succès jusqu'à présent puisqu'en cent jours, cet autre ancien de Goldman Sachs a réussi a sortir son pays de l'œil du cyclone, en changeant comme jamais le visage de l'Italie. La leçon vaut pour les autres pays. En France, François Hollande annonce-t-il autre chose quand il parle de "redressement national", même s'il continue en même temps de faire croire que la gauche française saurait mieux préserver le modèle social que les gauches européennes ? Et Nicolas Sarkozy, qui en appelle au « courage » pour rétablir une « France forte », ne prépare-t-il pas, sans le dire clairement, un nouveau programme d'austérité pour l'après-élection ? Si on écoute Mario Draghi, le modèle social français aura bien du mal à survivre à 2012.  la question est au cœur de la campagne mais chut, il ne faut pas le dire... trop fort !

 

 

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25 février 2012 6 25 /02 /février /2012 21:49

Article paru dans la parisien.

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Le ministre allemand de l'Intérieur, Hans-Peter Friedrich, a plaidé dans une interview samedi pour une sortie de la Grèce de la zone , affirmant que les chances de son économie de redevenir compétitive seraient ainsi plus grandes.
"Je ne parle pas d'exclure la Grèce" de la zone euro, a assuré Hans-Peter Friedrich dans l'hebodmadaire Der Spiegel, "mais de parvenir à créer des incitations pour un retrait qui ne puissent pas être déclinées".


"En dehors de l'Union économique monétaire, les chances de la Grèce de se régénérer et de devenir compétitive sont assurément plus grandes que si elle reste dans la zone euro", a poursuivi le ministre de l'Intérieur, membre de l'Union chrétienne-sociale (CSU), l'aile bavaroise du parti de la chancelière .


Angela Merkel, qui souhaite le maintien de la Grèce en zone euro, doit obtenir lundi un large "oui" des députés du Bundestag au dernier plan d'aide à la Grèce.
Début janvier, elle avait réitéré avec le français Nicolas Sarkozy sa volonté de maintenir la Grèce dans la zone euro à condition que des réformes budgétaires soient mises en place par Athènes.

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23 février 2012 4 23 /02 /février /2012 15:12

 


 
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22 février 2012 3 22 /02 /février /2012 19:35

 


 

 

 


 
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22 février 2012 3 22 /02 /février /2012 15:42
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21 février 2012 2 21 /02 /février /2012 14:55

 Article paru dans les echos

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Rappel: "Depuis un an, toute la politique gouvernementale est aux ordres d'instances étrangères. C'est donc une occupation, une dictature, une colonisation. Georges Papandréou n'a plus de crédit, ni de légitimité." Ilias Iliopoulos, secrétaire général du syndicat de la fonction publique, le 29/05/2011


 

Le plan de sauvetage conclu cette nuit par les ministres des Finances de la zone euro «prévoit de renforcer la surveillance de la Grèce et d'imposer une présence permanente de la mission de la Commission européenne sur place» chargé d'aider le pays à moderniser son appareil d'Etat, a expliqué le commissaire européen aux Affaires économiques, Olli Rehn.

Au bout de la nuit, les Européens ont fini par arracher l'accord qui permet à la Grèce de ne pas tomber dans le précipice. Bien sûr, tout le monde sait que le répit n'est que temporaire, et qu'Athènes n'en a pas fini avec les crises. Mais au moins, ce marathon de 13 heures de négociations a permis d'aboutir tôt ce matin à un accord sur un plan d'aide de 130 milliards d'euros. Un renflouement qui permet d'éloigner le spectre du défaut de paiement pour le pays, confronté à une échéance obligataire de 14,5 milliards d'euros le 20 mars prochain.

«C'est un plan sans précédent» qui doit «garantir l'avenir de la Grèce dans la zone euro», a assuré le chef de file des ministres des Finances de la zone euro, Jean-Claude Juncker, à l'issue des négociations. «Désormais, la Grèce a vu le poids de sa dette allégée, ce qui doit l'aider à restaurer la compétitivité de son économie», a souligné Christine Lagarde, la directrice générale du Fonds monétaire international, qui a participé à la réunion. Celle-ci a précisé que le dossier serait instruit lors d'un conseil d'administration du FMI la deuxième semaine de mars, où sera abordé «le montant de la contribution du FMI au programme», alors que les Européens s'inquiètent d'une participation du FMI moins forte que par le passé.

A son arrivée hier après-midi à Bruxelles, François Baroin avait jugé que «toutes les pièces du puzzle étaient sur la table», et qu'il suffisait de les emboîter. Ce puzzle s'est finalement révélé diablement compliqué à achever. Avant de donner le feu vert au plan d'aide à Athènes, les Etats de la zone euro voulaient en effet s'entendre sur les moyens pour ramener la dette grecque dans une trajectoire acceptable. Les dernières projections ont en effet indiqué que cette dernière serait plus proche de 129% que de 120% à l'horizon 2020. Voici le document confidentiel de la Troïka sur la 'soutenabilité' de la dette grecque :

«Il nous faut tendre à nouveau vers ces 120%, mais si on parvient à 123 ou 124%, ça restera dans les clous», estimait au début de la séance un diplomate d'un pays poussant à l'accord. En face, le trio des AAA (Finlande, Pays-Bas et Allemagne) - qui ont perdu confiance en Athènes -se sont montrés beaucoup plus stricts sur l'objectif.

Au final, et selon le texte officiel de l'Eurogroupe, les ministres de l'euro zone ont réussi à combler le trou financier en atteignant un taux d'endettement de 120,5% en 2020, en faisant appel à la fois aux fonds publics et aux fonds privés. Côté public, les négociateurs se sont entendus sur une réduction des taux d'intérêt des prêts consentis à la Grèce lors du premier plan d'aides datant de 2010. Les banques centrales de la zone euro vont également être mises à contribution. Cela passera notamment par un coup de pouce accordé par la BCE, qui s'est dit prête à redistribuer aux Etats de la zone euro les plus-values réalisées sur des obligations grecques achetées en dessous de leur valeur nominale, plus-values ensuite redirigées vers la Grèce par les Etats.

Plus de 70% de perte nette des banques et des fonds

Côté privé, les Européens ont fini par se résoudre à rouvrir hier soir les négociations avec les banques sur l'effacement volontaire de la moitié de la dette due par Athènes à ses créanciers privés. Les négociateurs mandatés par l'Institut de finance internationale, Charles Dallara et Jean Lemierre, avaient fait le déplacement à Bruxelles. Après de longues discussions, ils ont fini par accepter de subir une décote de 53,5% sur la dette grecque au lieu de 50% prévu initialement, soit 107 milliards sur un total de 200 milliards. Au total, si l'on rajoute la maturité allongée des nouvelles obligations que les créanciers privés vont recevoir en échange de leurs anciens titres, ainsi que le taux d'intérêt plus faible attaché à ces obligations, alors la perte nette des banques et des fonds dépassera les 70%.

Toutes ces aides ne sont pas sans contreparties. Durs parmi les durs, les Pays-Bas ont réclamé dès le début des négociations une surveillance «permanente» de la Grèce par l'Union européenne et le Fonds monétaire international. Ils auront obtenu satisfaction, au prix pour la Grèce de nouveaux empiétements sur sa souveraineté. Ainsi, le plan de sauvetage «prévoit de renforcer la surveillance de la Grèce et d'imposer une présence permanente de la mission de la Commission européenne sur place» chargé d'aider le pays à moderniser son appareil d'Etat, a expliqué le commissaire européen aux Affaires économiques, Olli Rehn.

Signe d'une perte complète de confiance des Européens envers la classe politique locale, Athènes devra également inscrire à terme, dans sa Constitution, que le service de la dette est une priorité nationale. Les fonds alloués seront par ailleurs logés dans un compte dédié -une solution légèrement différente techniquement du compte bloqué défendu initialement par la France et l'Allemagne -à rembourser les échéances obligataires. Pour autant, pas question de parler de tutelle sur le pays. «La tutelle n'est pas un mot qui fait partie de notre vocabulaire. Un contrôle, un monitoring, un accompagnement, des conseils, un suivi, une poursuite de l'expertise par la troïka (UE/BCE/FMI), mais tutelle en aucune façon», a assuré François Baroin à l'issue de la réunion.

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21 février 2012 2 21 /02 /février /2012 14:45
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20 février 2012 1 20 /02 /février /2012 17:34

Tribune parue dans Marianne le 29 janvier.

Srecko Horvat est un journaliste croate qui vient d'assister, désabusé, à la mise sous tutelle de son jeune pays par l'UE. Un regard intéressant dans la mesure où il vient à contre courant de la non pensée qui consiste à lobotomiser les cerveaux des peuples par l'intermédiaire d'un ultimatum : C'est l'UE ou la mort.

La démocratie est morte vive la démocratie l'UE !

 

Alors qu'elle est traversée par la plus importante crise depuis sa création, l'Union Européenne s'apprête à accueillir la Croatie. Dans un climat d'instabilité économique, politique et identitaire, la Croatie va quitter les Balkans pour rejoindre les rangs de l'UE. A quel prix ? Srecko Horvat, auteur et directeur du « Subversive Forum » de Zagreb, la capitale croate, pense que la Croatie pourrait bien être « la nouvelle Jupiter de l'Europe ».

 

(FDEComite - Flickr - cc)

Six jours seulement après l’immolation de Mohamed Bouazizi en Tunisie qui allait déclencher le « printemps arabe », un ingénieur électricien de 41 ans travaillant pour la télévision publique, Adrian Sobaru, tentait de se suicider pendant le discours du premier ministre roumain prononcé devant le parlement en se jetant du balcon de l’hémicycle vêtu d’un T-shirt sur lequel était inscrit « Vous avez tué le futur de nos enfants ! Vous nous avez vendu ! ».
 
Peu de personnes ont vu dans cet acte un quelconque lien avec ce que l’Union européenne (UE) s’apprête à nous offrir dans le futur. Ces jours-ci, des milliers de Roumains protestent contre les mesures d’austérité imposées dans leur pays. D’autres manifestations ont lieu en Grèce, en Espagne, au Portugal ou en Hongrie dans un relatif silence médiatique.

Perte d’optimisme

Contrairement à l’époque de l’élargissement de l’Union européenne en 2004 ou en 2007, il n’y a plus d’optimisme dans l’air. Désormais, c’est à la Croatie de rejoindre le club. Nous sommes les témoins de la plus grande crise que l’UE ait connu dans son histoire. Pourtant, nous faisons comme ci cela n’affectera pas notre pays. N’est-ce pas étrange ?
 
D’un côté, l’UE est confrontée à une importante contestation, mais seulement depuis peu d’années. Et ce en Espagne, en Grèce, au Royaume-Uni, au Portugal, en Hongrie et désormais en Roumanie. D’un autre, une nouvelle tendance politique de fond se dessine qui ne se résume pas au constat du succès des gouvernements de droite en Europe. Une menace encore plus importante pèse sur la démocratie : l’accession au pouvoir d’une nouvelle élite composée de technocrates, de personnes ayant travaillé pour Goldman Sachs comme Mario Monti, Mario Draghi ou Lucas Papademos. Ce dernier est d’ailleurs – si l’on se permet un peu d’humour - le meilleur exemple de ce qui ne va pas aujourd’hui avec l’Union européenne.
 
Si nous nous intéressons au sens étymologique du mot « papa » (qui signifie « père » ou « au revoir » en croate), nous avons en même temps un nom qui peut dire « père du peuple » (Papa demos) et « au revoir au peuple » (Pa-pa demos). Il y a quelques jours, alors que je rencontrais Slavoj Žižek à Ljubljana et lui faisais part de cette étrange coïncidence, il fit une brillante synthèse hégélienne : « si tu mets les deux ensemble  » me dit-il, « tu obtiens plus ou moins le mythe de Saturne qui mange ses enfants, excepté Jupiter  ! » (en croate, « papa » signifie aussi « manger »).
Le référendum croate n’est qu’un nouveau symptôme du déficit démocratique de l’UE. Nous l’avons obtenu une fois que tout avait déjà été décidé. Nous ne l’avons pas eu en 2003 lorsque la Croatie a posé sa candidature pour devenir membre. Nous ne l’avons pas eu non plus en 2005 lorsque le pays a officiellement ouvert les négociations avec l’UE. Enfin, nous ne l’avons même pas eu en 2010 lorsque le gouvernement a changé la Constitution et les règles sur le référendum pour pouvoir devenir membre de l’UE. En d’autres termes, nous sommes aujourd’hui dans une situation dans laquelle il nous est demandé de choisir ce qui a déjà été choisi lors de toutes ces étapes précédentes. Et il faudrait appeler cela démocratie ?
 
Immédiatement nous est opposée une question répétée à l’envie par le gouvernement : « quelle est l’alternative à l’adhésion du pays à l’UE ? ». Cette question ressemble à un chantage et rappelle un slogan infâme de Margaret Thatcher. Et il y a un paradoxe supplémentaire concernant cet exécutif : nous avons désormais un gouvernement prétendument « social-démocrate » qui met en place des « réformes » néolibérales plus rapidement et plus efficacement que l’ancien gouvernement conservateur. Il a déjà annoncé des privatisations graduelles des autoroutes et du train, du secteur énergétique et même des prisons ! Ceci est un exemple de la « doctrine du choc ».
 
Dans le même temps, nous sommes les témoins d’une étrange situation. Le gouvernement essaie de convaincre les gens que nous devons rejoindre l’UE car nous ne ferions déjà plus partie des Balkans et parce que cette intégration ne nous corrompra pas (ce sont les deux principaux arguments qui ont été utilisés pendant la campagne). Mais si on y regarde de plus près, l’Europe est déjà « balkanisée » et les Balkans sont, quant à eux, « européanisés ». Et ce, pas seulement parce qu’ils se sont ouverts au marché, mais parce qu’ils sont également touchés par la corruption : l’ancien premier ministre croate actuellement en prison pour corruption menait ses affaires avec des entreprises européennes - une banque autrichienne et une compagnie pétrolière hongroise-. On pourrait également citer les cas de Jacques Chirac et Christian Wulff. Ainsi, lorsque l’on parle de « réformes » ou de « monitoring », pourquoi cela ne s’appliquerait-il pas d’abord à l’UE elle même ? Et pour aller à l’extrême : pourquoi les nouveaux pays membres ne « monitoreraient » ils pas l’UE ?
 
Peut-être le temps est-il venu de s’inspirer de la fameuse formule de Max Horkheimer pour dire que « ceux qui ne veulent pas parler de néolibéralisme devraient également garder le silence au sujet de l’Union européenne ». Il en va de même pour les « réformes » en Croatie. Ceux qui ne veulent pas en entendre parler dans le secteur financier devraient avoir la même position sur bien d’autres sujets (les lois, les droits humains, etc.). Savez-vous que plus de 90 % des banques croates sont déjà autrichiennes, françaises, allemandes ou italiennes ? Désormais, les élites euro-compatibles croates veulent mettre en place des réformes néolibérales présentées comme nécessaires à l’adhésion du pays à l’UE.
 
C’est peut-être ce que voulait dire Monsieur Barroso lorsqu’il développait l’idée selon laquelle l’intégration de la Croatie à l’UE renforcerait cette dernière (avec les nouvelles privatisations et les nouveaux flux de capitaux). Mais d’un autre côté, l’Union européenne rejoindra peut-être les Indignés croates et au lieu d’avoir une Europe plus forte, nous aurons alors un mouvement de contestation plus fort. De récentes statistiques montrent que la Croatie, avec un taux de 40 %, est le deuxième pays d’Europe en termes de chômage des jeunes après l’Espagne. Elle est suivie par la Grèce. Peut-être est elle le nouveau Jupiter de l’Europe.

Record d’abstention

A la veille du référendum du 22 janvier, l’ancien général de guerre Ante Gotovina – qui séjourne à La Haye depuis sa condamnation par le Tribunal pénal international pour l’ex Yougoslavie et qui fut l’un des principaux obstacles à l’ouverture des négociations avec l’UE – a envoyé son épître aux Croates en les enjoignant de voter en faveur du « Oui » à l’adhésion. Dans le même temps, les deux principaux partis du pays, le Parti social-démocrate - actuellement au pouvoir - et les conservateurs de Union démocratique (HDZ) – qui dirigeaient auparavant -, avec l’Eglise catholique, ont fait tout leur possible pour convaincre les électeurs « qu’il n’y avait pas d’autre alternative ».
 
Quelques jours avant le référendum, le ministre des Affaires étrangères est allé très loin dans son argumentation pour le « Oui » en expliquant que le gouvernement ne pourrait plus payer les retraites en cas de victoire du « Non » ( du fait, selon lui, de la dégradation de la note du pays par les agences de notation en cas de défaite du « Oui »).
 
Ces dernières semaines, la campagne du « Oui » s’est développée autour de ce type d’arguments basés sur le chantage. Parmi ceux-ci encore : « si nous n’entrons pas dans l’UE, nous resterons dans les Balkans ».
 
Dans cette atmosphère, il n’est pas étonnant que le référendum en Croatie sur l’adhésion à l’UE ait enregistré le taux de participation le plus faible de tous les pays membres. Avec une participation de 43 % des citoyens, la Croatie a battu l’ancien record détenu jusqu’ici par la Hongrie ( 45 % de participation). Une explication possible a joliment été formulée par le Premier ministre après l’annonce des résultats officiels : « effrayés par la possibilité d’un échec du référendum, nous avons changé la Constitution ».
 
Si la définition du cynisme – nous savons parfaitement ce que signifie ce que nous faisons mais nous le faisons quand même – devait prendre tout son sens, c’est ici. Ce n’est pas seulement que les règles du référendum ont été modifiées pour assurer une victoire du « Oui ». Toutes les règles (cadres juridiques, lois économiques, etc.) ont été soigneusement changées au cours de ces dix dernières années pour garantir cette victoire. Si l’on ajoute à cela la grave crise actuelle qui secoue l’UE, on comprend pourquoi la faible participation des Croates au vote n’est pas une grande surprise...

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20 février 2012 1 20 /02 /février /2012 17:18

Article paru sur Marianne.

Voici un article de Claude Nicolet, membre du MRC de Jean-Pierre Chevènement, paru dans Marianne le 16 février dernier. Où comment une minorité politique issue de l'opposition porte à bout de bras l'honneur de la gauche républicaine...


Pour Claude Nicolet, « ce qui se déroule aujourd'hui (en Grèce) est tout simplement historique. On voit un peuple d'Europe se révolter contre la promesse européenne qui devait apporter au continent la paix, la prospérité, l'emploi, la croissance... »

 

(Thanasis Troboukis - Flickr - cc)

« La rue flambe, la Grèce s'embrase, des scènes de guérilla urbaine, les casseurs triomphent... » Les commentaires vont bon train quant aux scènes de violence qui émaillent l'actualité grecque et européenne.
 
Il faut le dire, aujourd'hui, le remède proposé n'est pas seulement économique ou financier, il est consubstantiellement antidémocratique. Le peuple grec refuse que son pays soit « vendu » aux « européens ». Il refuse que sa dignité de peuple libre soit foulée aux pieds par le FMI et la Commission européenne.
 
Le lien entre l'Europe et la liberté se déchire sous nos yeux et ce qui apparaît ce n'est que la loi terrible du marché. Ce qui se déroule aujourd'hui est tout simplement historique. On voit un peuple d'Europe se révolter contre la promesse  européenne qui devait apporter au continent la paix, la prospérité, l'emploi, la croissance...

La faute à l’Etat ou à l’Union ?

Certes, le modèle économique de la péninsule n'est probablement pas exempt de reproche, ses dirigeants politiques sont loin d'être irréprochables, mais est-ce là le fond du problème ? Est-ce là la réalité ? Bien sûr que non et nous le savons tous si nous regardons les choses avec un tant soit peu d'honnêteté intellectuelle et de rigueur dans le raisonnement.

Tout d'abord l'euro ne peut plus fonctionner comme il fonctionne. Encore une fois sur la question monétaire nous nous sommes aveuglés. En faisant Maastricht ses partisans ont tenté de faire passer l'incantation pour une perspective inéluctable : la monnaie unique entraînerait la convergence économique. Mais non.

Une monnaie est un marqueur identitaire

Les grands prêtres du franc fort accroché au Deutsch Mark ont oublié une chose : une monnaie n'est rien si ce n'est un outil et un marqueur identitaire. Un outil  au service de l'économie d'un pays et d'un peuple qui est ce pays et s'identifie à lui. C'est aussi la photographie de la réalité d'une économie, de son reflet.
 
Nous avons l'économie de notre monnaie et la monnaie de notre économie. Elle est aussi l’illustration d’une identité voire d’un tempérament national. Or l'euro qui n'est aujourd'hui qu'un Mark bis, peut-il être la monnaie de la Grèce et de son économie ? Non. Peut-il être la monnaie de l'Espagne, de l'Italie, du Portugal ? Non. De la France ? Non.

L’Europe n’est pas allemande et ne le sera jamais. Pas plus qu’elle n’est française et ne le sera jamais. Or les monnaies ont besoin de ces marqueurs identitaires. Ce ne sont pas seulement des statistiques, des algorithmes, des valeurs boursières, des équations mathématiques.

Désillusions

Mais les grands prêtres de la monnaie unique ne peuvent pas, ne doivent pas abjurer. Ils sont les gardiens du dogme, donc du système. Peuvent-ils annoncer Urbi et Orbi que les Saintes Ecritures des traités de Maastricht, de Lisbonne, du pacte de stabilité, d'Amsterdam...ne nous ont pas conduit à la Terre promise du bonheur économique éternel. Ce paradis promis nous ne l'avons pas encore suffisamment mérité. Il faudra alors passer par une vallée de larmes et c'est aux Grecs d'ouvrir la voie.

Nouvelles baisses des pensions. Suppression de 15 000 fonctionnaires supplémentaires, baisse de 22 % du salaire minimum, baisse de 32 % du salaire minimum pour les moins de 25 ans, nouvelles privatisations...

Alors plutôt jouer avec le feu, prendre le risque de briser un pays, un peuple, une nation, une démocratie que de remettre en cause les raisons de la crise. L’euro est un carcan pour des pays, des économies qui ne peuvent s’aligner sur les critères allemands de productivité, de compétitivité, de déflation salariale, de tissu industriel très serré. Quel point commun entre l’économie allemande et grecque ?
Alors qui est le plus violent ? Ceux qui refusent de voir leur pays mis à l'encan aux profits d'intérêts étrangers ? Ceux qui voient leur démocratie être mise « sous tutelle » du FMI et de l'Union européenne ? Ceux qui voient leur société voler en éclat au nom de la compétitivité, du libre échange, de la concurrence ? Ceux qui se suicident comme jamais la Grèce n'a connu une telle épidémie qui touche celles et ceux qui retournent contre eux la violence faite à leur pays et à leur société ?

 
La situation grecque doit nous servir d’exemple et d’avertissement et il faut appeler un chat un chat : les mêmes causes entraîneront les mêmes effets. L’euro dans son fonctionnement actuel est en train de détruire l’Europe comme idée de coopération possible entre Etats Nations. Il s’attaque donc aux fondements même de la démocratie. La fuite dans je ne sais quel mirage fédéraliste ne fera que nous précipiter dans des impasses politiques et intellectuelles d’où sortiront le pire.
 
Les peuples n’accepteront pas d’être asservis et de voir leur histoire, leurs combats pour le progrès social, détruits sur l’autel d’intérêts particuliers. Il faut donc de façon urgente proposer un « Plan B » pour une monnaie qui nous fait désormais courir un risque majeur. Il ne faut pas chercher plus loin d’où vient la fameuse montée des « populismes ». Les souverainetés nationales existent, elles sont inséparables de la question sociale. Nous en avons encore une démonstration flagrante aujourd’hui. Mais il n’y a pas de pire aveugle que celui, ou celle, qui ne veut pas voir.

 

 

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20 février 2012 1 20 /02 /février /2012 07:24

  Article paru dans la lettre volée.

 

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Jean-Jacques Rosa est professeur d'économie à Sciences-Po. C'est un libéral sérieux, au sens où son enseignement repose sur la lecture et la libre discussion de textes de référence.

Indubitablement c'est un esprit fort car il fait partie des rares économistes à s'être élevés publiquement contre l'euro dès le début. Il publiait ainsi "L'erreur européenne" dès 1998.

Sur son blog, malheureusement en anglais (ce qui, à mon avis, le prive de tout dialogue avec ses lecteurs), il commente favorablement des auteurs plutôt de gauche comme Rodrik ou Krugman ou déniche un article de la Réserve fédérale de San Francisco montrant que la politique de la BCE sert les états du nord de la zone euro.

 

Son court ouvrage est original pour plusieurs raisons.

 En bon libéral soucieux des questions d'intérêt, il se pose la question de savoir qui gagne réellement à l'euro - question que l'on pourrait tout aussi bien trouver furieusement marxiste.

Pour lui, l'euro est un projet porté par les groupes européens désireux de coordonner des politiques de cartel (les banques au premier chef, mais toutes les industries également), mais aussi par les grands emprunteurs (banques, états et entreprises) susceptibles d'économiser quelques points de pourcentage sur leurs emprunts libellés en une monnaie forte (A terme cependant, la perte globale de croissance entraînée par l'euro fera plus que compenser ces gains initiaux y compris pour les groupes considérés.)

Il s'est donc constitué, pour Rosa, une classe qui a un intérêt direct à l'Union européenne et à son renforcement, y compris un intérêt personnel et financier direct ("les plus grandes firmes payant généralement des salaires plus élevés que les plus petites, le prestige et les rémunérations des fonctionnaires et dirigeants politiques sont liés à la grande dimension de l'ensemble qu'ils régissent".)

Il rappelle également que dans un monde où les frontières s'affaissent, l'avantage est aux nations capables de s'adapter rapidement, pas à des structures hiérarchiques centralisées de type bruxellois.

Autre point : les bulles grecques, irlandaise et espagnole viennent aussi du fait que le taux d'intérêt de la BCE était trop élevé par rapport à la situation de boom économique que connaissaient ces pays. Des taux d'intérêt gérés par des banques centrales nationales, décentralisés, auraient été plus élevés dans des périodes de prosperité, limitant les bulles.

 Il revient enfin en détail sur la notion de zone monétaire optimale et montre pourquoi la zone euro ne constitue pas une ZMO, en l'absence notamment d'un budget fédéral européen.

Libéral cohérent, il sait chercher ailleurs que dans des raisons économiques les raisons qui empêchent la constitution d'un budget fédéral européen : l'absence d'un corps politique européen ("pour que de tels transferts soient consentis entre pays indépendants il faut une autorité politique légitime capable de faire accepter des impôts correspondants aux contribuables de certains pays pour venir en aide, de façon parfois massive, à des citoyens d'autres pays. Cela n'existe pas en Europe où l'impôt proprement européen est minime et sert principalement aux subventions agricoles de la PAC. Les réticences des pays d'Europe du Nord à payer pour aider la Grèce montrent d'ailleurs toutes les difficultés de ce genre en l'absence d'une unification politique, mais mettent également en doute la possibilité d'une telle unification qui suppose l'existence préalable d'une solidarité suffisante". En d'autres termes, les concepteurs de l'euro ont mis la charrue avant les boeufs.)

Sur la sortie de l'euro, qu'il préconise, il ne nie pas que cela peut avoir un coût en termes de renchérissement de la dette. Mais rien à voir avec le cataclysme annoncé. Pour lui, la dette serait accrue de 11% du PIB, ce qui est important mais doit être mis en regard avec les hausses de rentrées fiscales que permettront  le retour à la croissance, via notamment la dévaluation du franc - par ailleurs j'ai, à titre personnel, un doute sur ce coût de 11%, j'y reviendrai plus tard.

*

J'aime surtout que ce court ouvrage écrit par un libéral se termine par des considérations politiques portant sur la notion de démocratie.

En termes de satisfaction des électeurs, Rosa note par exemple que l'adoption de politiques centralisées par Bruxelles provoque mécaniquement plus de mécontentement dans l'Union (et de désintérêt) que la décision décentralisée dans chaque communauté politique nationale - je gage qu'un ministre européen des affaires étrangères nous aurait ainsi engagés en Irak, toute l'Union, alors que dans un cadre décentralisé, chaque nation européenne a fait ses choix propres.

Très platement, il note que l'électeur français choisit 100% de la représentation nationale, contre 13% du Parlement européen. J'ajoute que l'électeur français y gagnerait algébriquement si le pouvoir du Parlement européen était sept fois supérieur à celui du Parlement français. J'en doute.

Même chose, l'électeur français nomme 100% du gouvernement français mais 4% des commissaires européens...

Ces chiffres ne mesurent rien de tangible mais illustrent bien le fait que "le passage à une politique continentale ne peut qu'affaiblir la satisfaction démocratique des électorats nationaux si ces derniers ont des préférences spécifiques et ne forment pas, en termes de préférences, un "peuple unique" avec ceux des autres pays membres".

En sens inverse de cette dilution du pouvoir des électeurs associée à une plus forte insatisfaction, le pouvoir des lobbies est évidemment renforcé : il est bien plus rentable pour des lobbies industriels d'obtenir des décisions favorables dans un marché centralisé de 450 millions de consommateurs que dans plusieurs marché de quelques millions, voire milliers d'habitants.

Le plus grave de toute cette aventure européenne, au delà de ces considérations qui pourraient paraître mesquines, est que la construction européenne nous demande de nous habituer chaque jour à moins de démocratie. C'est au fond ce qui choque le plus le citoyen Rosa, plus encore, j'en ai l'impression, que l'économiste. Et c'est ce qui me conduit à trouver ce livre très attachant.

Selon Rosa, il y a tout à gagner à l'éclatement de l'euro, y compris donc une certaine restauration de la démocratie : "En renversant le mouvement, dans le domaine monétaire, par la sécession, on restaure ainsi les conditions d'une discussion ouverte de ces politiques. Une telle mutation revitalisera la vie politique en redonnant aux débats un contenu significatif, en brisant la collusion gauche-droite, public-privé, réduisant aujourd'hui les querelles nationales à des affrontements de personnes sans aucun intérêt pour le citoyen ordinaire et son avenir. [...] Le laboratoire de l'expérience ayant confirmé les conclusions de la théorie, le doute n'est plus permis. L'euro a constitué une parenthèse réactionnaire et antidémocratique très paradoxale dans une ère de décentralisation organisationnelle et de compétition accrue. Il faut maintenant impérativement en sortir pour revenir à l'indépendance monétaire et recréer le franc".

*

Il y a encore pas mal de détails intéressants que je ne commente pas plus. L'ouvrage vaut d'être lu.

*

 Pour finir sur une touche personnelle. Comme étudiant, j'ai eu pour enseignants Jean-Paul Fitoussi et Jean-Jacques Rosa, un économiste de gauche et un libéral "de droite". Force est de constater aujourd'hui que le plus vigoureux défenseur de la liberté et des valeurs de progrès n'est pas celui que j'aurais cru.

 

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  • : SORTIR DU TITANIC AVANT QU'IL NE COULE!! Ce blog vise à permettre au plus grand nombre de citoyens d'ouvrir les yeux sur la triste réalité du désastre de l'euro, dont le bilan catastrophique est désormais incontestable et dont la fin inéluctable se rapproche à grands pas.
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